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Le bruit sourd des turbopropulseurs nous fait glisser doucement vers
une sorte d’inconscient collectif, tandis que défile la mer bleue éclaboussée
de soleil.
Je ferme les yeux l’espace d’un instant et quand je regarde à nouveau
le hublot, le ciel s’est considérablement assombri et dans certains endroits,
il me paraissait même complètement noir.
Soudain, l’avion fut saisi comme dans une mâchoire et terriblement
secoué de haut en bas… des cris de peurs commencèrent à retentir à l’intérieur
de la cabine, tandis que le voyant signalant d’attacher les ceintures
s’allumait et que les masques à oxygène tombaient devant nos yeux. L’avion fit
une brutale embardée et commença à se balancer brusquement…
j’étais paniqué ! je ne savais absolument pas quoi faire !
C’est alors que j’entendis distinctement une voix calme appeler :
« Roald… »
je fixais le hublot dans le noir devenu maintenant total, mais rien…
Nous entendîmes la voix de l'hôtesse :
« Mesdames et Messieurs… suite à une météo particulièrement
capricieuse, nous allons faire demi-tour pour nous reposer sur Tahiti Faa’a…
nous vous remercions de votre compréhension… »
Mais à ce moment, tout le monde sent que l’avion s’enfonce vers la mer
et l’inclinaison de nos masques à oxygène nous donne bien la direction. C’est
alors qu’une voix stridente dit :
« on va s’écraser… on va s’écraser… »
Et ce qui couvait éclata, tout le monde se mit à hurler, à se débattre,
bref, à paniquer…La dame à côté de moi se lève pour prendre son sac… et retombe
sur moi ! Elle se débat pour se relever mais accroche une autre valise et
tout tombe sur moi ! J’essaie de la repousser, mais sa bêtise n’a d’égale
que sa cupidité… je me doute bien que son sac est important, mais je me dis que
si on s’écrase, ça risque de le devenir moins !
Elle continue ses gesticulations et arrive, tant bien que mal, à
arracher au néant son précieux sac. Heureuse, elle se repose sur son siège,
réussit à remettre sa ceinture, et se retourne… en m’envoyant son sac dans
l’œil ! je vois d’un seul coup tout un kaléidoscope de couleurs… j’ai mon
œil qui pleure, mais …